"Dans le futur, Electronic Arts sera une entreprise de free-to-play"Les personnages de mass effect
Frank Gibeau, président d'Electronic Arts Labels. A l'occasion de l'E3, il détaille les projets de l'éditeur de jeux vidéo.Lancement de la plateforme de vente dématérialisée
Origin, d'un concurrent de Call of Duty ou de World of Warcraft, investissement sur les réseaux sociaux et les mobiles... La stratégie d'Electronic Arts (EA) consiste-t-elle à occuper sur tous les fronts ?
Nous raisonnons plus en termes de franchises qu'en termes de plateformes de jeux. Nous pensons d'abord à la richesse et à la cohérence d'un jeu comme
Dead Space et ensuite, nous voyons comment nous pouvons l'adapter sur une console de salon ou sur téléphone mobile. Pour certaines licences, les portages ne fonctionnent d'ailleurs pas, auquel cas nous nous abstenons.
Avec la crise, les projets se concentrent sur de grosses licences, comme
Battlefield 3. Quid de productions comme Shadows of the Damned ou Mirror's Edge, qui se distinguent par des mécaniques de jeu et des univers innovants ?
Je crois aux nouvelles licences. Mais le cycle long des dernières consoles fait qu'il est difficile d'en créer, si bien que la meilleure décision, à l'heure actuelle, est de faire passer l'innovation dans les franchises déjà établies. Il est de toute façon nécessaire d'être créatif dans cette industrie, sinon, l'on meurt.
Le nombre d'abonnés à
Star Wars : The Old Republic est passé de 1,7 à 1,3 million. Jusqu'à présent, aucun concurrent de
World of Warcraft n'est parvenu à atteindre des chiffres satisfaisants. Comment l'expliquez-vous ?
Le marché des MMO est certes à haut risque, mais une fois qu'on y rentre, on y reste pour longtemps. Avec Star Wars : The Old Republic, nous sommes sur le secteur pour au moins cinq ou dix ans. Plusieurs phénomènes peuvent certes expliquer la baisse du nombre de joueurs, mais nous venons, lors des conférences de l'E3, d'annoncer des ajustements pour attirer de nouveaux joueurs.
Dans les MMO, le modèle de l'abonnement est aussi mis en cause par le free-to-play, un système dans lequel l'accès au jeu est gratuit, mais les contenus additionnels sont payants. Que pensez-vous de ce modèle ?
Dans le futur, Electronic Arts sera une entreprise de free-to-play, car ce modèle est bon pour les joueurs et pour les développeurs. Les concepteurs n'ont par exemple pas trois ans à atteindre avant de pouvoir mesurer les effets sur leur public. Un modèle free-to-play permet de tester et de voir ce qui plaît le plus. Les utilisateurs peuvent pour leur part tester librement et passer à autre chose si le jeu ne leur convient pas, sans préalablement débourser 60 dollars.
Electronic Arts ne ménage pas ses efforts dans les jeux sociaux. L'entreprise est toutefois à la deuxième ou troisième position, en termes de joueurs, derrière Zynga. Quelle est votre stratégie sur les plateformes sociales ?
Nous ne sommes pas satisfaits d'être deuxième ou troisième du secteur. Nous aurons moins de jeux sur la plateforme mais de plus grands jeux. C'est le cas par exemple de notre jeu de gestion Sim City social. En nous focalisant sur des titres forts, nous aurons par ailleurs plus de temps pour peaufiner les jeux. Nous voulons par ailleurs trouver un équilibre entre les jeux "casual" de Zynga, et les titres plus "hardcore" sur Facebook d'entreprises comme Kabam.
Votre saga Mass Effect 3 n'est disponible, sur PC, que sur votre propre plateforme de téléchargement. Une manière de se distinguer de votre concurrent Steam, édité par l'entreprise Valve ?
Valve est un grand partenaire, mais nous ne sommes pas d'accord sur certaines choses. Le contenu exclusif est ce qui intéresse le plus les joueurs, il est donc normal que les différents acteurs essaient de se démarquer.
L'une des forces de Steam est de proposer un catalogue de jeux indépendants. Un producteur de blockbusters comme EA peut-il investir dans ce type de créations ?
Origin s'ouvre aux jeux indépendants. Il est bon pour l'industrie que ces jeux soient visibles, et il est bon pour notre réputation d'accueillir des productions originales sur notre plateforme.
Propos recueillis par Laurent Checola pour "Le Monde"